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« Je suis ton homme », sur Arte : la possibilité d’un amour entre une femme et un robot

ARTE – VENDREDI 16 AOÛT À 20 H 55 – FILM
Le deuxième long-métrage de Maria Schrader examine l’hypothèse d’un être parfait, taillé sur mesure pour combler sa partenaire : Tom (Dan Stevens), un robot androïde, a été mis au point pour conquérir le cœur d’Alma (Maren Eggert), célibataire, chercheuse et spécialiste de l’écriture cunéiforme au Musée de Pergame, à Berlin.
Je suis ton homme ne s’inscrit pas dans le futur, mais dans un présent décalé, certains enjeux contemporains étant ici poussés à l’extrême. Dans le film, la société semble s’être résignée au fait que l’harmonie ne peut naître des seules relations humaines. L’intelligence artificielle est en train de s’étendre jusque dans la vie intime, venant au secours des amants esseulés. Après les sites de rencontre et leurs algorithmes, voici les androïdes, d’apparence masculine ou féminine, qui font leur entrée discrète sur le marché du couple.
Alma n’est pas la candidate idéale pour s’amouracher d’un robot. Elle n’est pas en quête de l’âme sœur, mais son département de recherche, en manque de subventions, doit trouver des fonds pour lui permettre de mener à terme ses travaux. Un contrat de mécénat est conclu, du moins Alma l’accepte-t-elle à contrecœur : elle va tester Tom durant quelques semaines, puis rédiger un rapport d’évaluation, moyennant quoi l’argent privé sera débloqué. Le spectateur ne verra ni laboratoire ni scientifique. La comédie ro(bot)mantique de Maria Schrader se concentre sur la possibilité d’une histoire entre une femme et un androïde.
La rencontre a lieu dans une salle de bal, où Tom, tout juste sorti de l’usine, attend Alma. Longiligne, les traits lisses, il a le regard bleu électrique branché sur Alma. Perplexe, incrédule, celle-ci se laisse entraîner sur la piste de danse, remplie de couples, pas tous des humains. Outre les androïdes, l’entreprise fait appel à des hologrammes, moins coûteux, pour peupler le bar et le dance floor.
Le film de Maria Schrader repose sur un duo d’acteurs très ciselé. Dan Stevens travaille le geste au millimètre, dans une chorégraphie subtile. Maren Eggert, elle, reste sur le qui-vive, entre retenue et explosion, entre passivité et rejet de cette situation.
A ce stade du scénario, le film bascule dans le surréalisme, s’aventurant à la frontière de l’humain et de la machine. Alma peut-elle être touchée par l’amour de Tom ? Elle n’est pas dupe, il mettrait autant de zèle à séduire une autre femme s’il était « réinitialisé » pour une nouvelle rencontre. Mais les humains ne passent-ils pas aussi leur temps à se « réinitialiser » ? Tom est-il si éloigné d’Anna ? Mis au point par des hommes et des femmes, les robots nous renvoient à notre condition d’êtres « construits », socialement, culturellement. Et la mélancolie du robot existe.
Je suis ton homme, de Maria Schrader. Avec Dan Stevens, Maren Eggert, Sandra Hüller (All., 2022, 121 min).
Clarisse Fabre
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